Prudemment mais sûrement, le Gouvernement s’est emparé de la question en lançant un programme d’investissements d’avenir (PIA), devant permettre de ’’tester sur le terrain, par des applications concrètes, le potentiel l’IA’’(Cf. communiqué de presse commun de la Dinsic et de la DITP).
C’est ainsi que le CHU de Toulouse a été retenu, dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt (AMI), pour un projet d’utilisation de l’IA pour aider au diagnostic et optimiser la préparation des réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) post-opératoires dans le cas du cancer du poumon. Il devrait aboutir à un prototype fonctionnel en octobre 2019.
Le CHU de Bordeaux a été retenu, quant à lui, pour un projet visant à utiliser l’IA pour procéder à des recherches sémantiques dans le dossier patient informatisé afin de ’’retrouver les bonnes informations au bon moment’’, l’idée étant de faire gagner du temps au personnel soignant dans la recherche d’informations sur le patient.
En partenariat avec l’université de Lille, le CHU de Lille a lancé le projet Include, reposant sur la création d’un entrepôt de données de santé (EDS) et l’utilisation d’un serveur de calcul intensif exécutant des algorithmes d’apprentissage de type machine learninget deep learningpour réaliser des modèles prédictifs.
L’objectif de cet EDS, qui recueillera quantité de données diverses (courriers médicaux, comptes-rendus d’imagerie médicale et d’anapath, prescriptions médicales, etc.), c’est de devenir un guichet unique de données facilitant la collaboration entre industriels et monde académique.
Associé à la société Quinten, le centre hospitalier de Valenciennes a lancé le projet PharmIA, ayant pour objectif de comprendre la surmortalité dans la région, due aux erreurs de prescription médicamenteuse.
Quant à l’AP-HP, elle multiplie les travaux informatiques de nature à faciliter la recherche et industrialiser de nouveaux flux d’informations.
L’IA, on le voit, va contribuer à révolutionner notre compréhension du cancer et améliorer la qualité et la sécurité des soins.
De nombreuses questions restent cependant à résoudre, et dans le détail desquelles il est présentement impossible d’entrer. L’hôpital devra par exemple réfléchir au modèle technique et économique le plus adapté.
Qu’en est-il de la sécurisation des données de santé ?
Elle pose également la question de la propriété des données, étant rappelé que les données de santé à caractère personnel, protégées par le RGPD, ne sont pas appropriables et qu’elles échappent à la commercialité.
En revanche, la base de données ne contenant aucune donnée personnelle identifiante, directement ou indirectement, peut être commercialisée et exploitée. Encore faut-il valider et assurer la stricte anonymisation des données au regard des exigences des lignes directrices du G29 et des différentes règles et normes nationales pouvant exister dans chaque État membre de l’Union européenne, en appliquant les critères de l’individualisation, l’inférence et la corrélation.
L’anonymisation totale et effective de ces données se positionne comme le garde-fou par excellence, à condition encore une fois de bien délimiter le curseur de la ré-identification de la personne.
Par leur taille et leur expertise historique, les CHU – avec l’aide des bons partenaires – sont tout désignés pour être le fer de lance de l’IA en santé.
Les auteurs
Me Omar YAHIA et Me Domitille Flageul
Selarl Yahia Avocats
Barreau de Paris