Transformation du système de santé : un rapide tour d’horizon

25 Sep 2019

Quatrième loi en matière de santé depuis 2009, la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 poursuit un triple objectif : refonder les études médicales et améliorer les compétences des professionnels de santé ; développer de nouvelles formes de coopération territoriales de soins au service des patients ; assurer un déploiement du numérique (dossier médical partagé, espace numérique de santé, télésoins).

Des GHT de plus en plus intégrés

Parmi les mesures pouvant intéressant les lecteurs, retenons que le Gouvernement a souhaité renforcer l’intégration dans les GHT, sans aller jusqu’à l’établissement public de santé de territoire (EPST) proposé par le rapport Pribile-Nabet.

Ainsi, les commissions médicales de groupement sont désormais obligatoires et une nouvelle fonction mutualisée est ajoutée (la gestion des ressources humaines médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques). Un droit d’option est également ouvert pour les GHT qui souhaiteraient aller plus loin, en leur permettant de mettre en commun leur trésorerie, élaborer un programme d’investissements et un plan global de financement pluriannuels communs ou encore signer un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens unique avec l’ARS. Une ordonnance interviendra ultérieurement pour organiser les conditions dans lesquelles les établissements partie à un GHT peuvent fusionner tout ou partie de leurs instances représentatives ou consultatives.

Cette intégration renforcée ne règle toutefois pas les faiblesses des GHT maintes fois relevées (extrême hétérogénéité, problèmes de dimensionnement, coopération hospitalo-centrée, etc.).

Mise en œuvre de trois plateformes numériques de santé : ENS, DMP et Health Data Hub

Le titre III de la loi est entièrement dédié à la volonté de « développer l’ambition numérique en santé ». L’article 45 de la loi dote chaque citoyen, automatiquement sauf opposition de sa part, d’un espace numérique de santé (ENS) lui offrant la possibilité de gérer ses données de santé et de participer à la construction de son parcours de santé. Accessible en ligne, celui-ci devra notamment permettre de disposer des données de remboursement, du dossier médical partagé (DMP), des données de santé produites par des applications ou des objets connectés référencés ou encore d’outils de messagerie proposant des échanges sécurisés avec les acteurs du système de santé. Dans un premier temps, le compte Ameli et le DMP ont donc vocation à constituer les premières briques de l’ENS mis en place au plus tard à compter du 1er janvier 2022.

La création du DMP deviendra automatique, sauf opposition de la personne concernée ou de son représentant légal dûment informés. La mesure devrait contribuer à la réalisation de l’objectif fixé par l’assurance maladie de 40 millions de DMP actifs d’ici 2022, contre environ 6 millions actuellement. De leur côté, les professionnels de santé pourront accéder à une plateforme de bouquets de services communicants. La mesure ne nécessite pas en elle-même de modification législative mais son succès dépendra de l’interopérabilité effective des systèmes d’information. À cet égard, l’article 44 de la loi renforce les exigences de conformité à des référentiels d’interopérabilité opposables aux différents services ou outils numériques en santé.

Enfin, la troisième plateforme sera constituée par le Health Data Hub créé par l’ajout de données recueillies à l’occasion d’activités de prévention, de diagnostic, de soins ou de suivi médico-social à celles, de type médico-administratif, déjà regroupées dans le système national de données de santé (SNDS) issu de la loi du 26 janvier 2016, l’idée étant de positionner la France parmi les pays leaders en structuration des données de santé. Partant du principe que ces données financées par la solidarité nationale constituent un patrimoine commun qui doit être partagé et valorisé, la mesure s’inscrit dans le rapport des préconisations du rapport Villani ambitionnant de positionner la France à l’avant-garde de l’intelligence artificielle.

Télémédecine et télésoin

La loi ambitionne de déployer plus largement la télémédecine et les télésoins, désormais regroupés sous l’appellation de télésanté. Le texte a introduit une nouvelle forme de pratique de soins à distance (« télésoin ») utilisant les technologies de l’information et de la communication et mettant en rapport un patient avec un ou plusieurs pharmaciens ou auxiliaires médicaux. Parmi les exemples d’actes de télésoin mentionnés lors des débats parlementaires figurent la réalisation de bilans médicamenteux, l’éducation thérapeutique ou encore la télé-orthophonie.

Sans attendre l’édiction des ordonnances annoncées, la loi du 24 juillet 2019 apporte d’ores et déjà des outils pour édifier un véritable système de santé.

 


L’auteur

Me Omar YAHIA
SELARL YAHIA Avocats
Barreau de Paris

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